Sommet de la CEDEAO : Quelles réactions pour le CNRD face aux recommandations ? (CRAS)

« Les temps se suivent, mais ils ne se ressemblent pas ». « Les saisons se succèdent mais elles diffèrent », dit-on.

Le samedi 04 juin 2022, le communiqué final du sommet des Chefs d’État de la CEDEAO tenu à Accra consacré à la Guinée a recommandé entre autres l’envoi d’Ibn Chambas comme émissaire à Conakry, le réaménagement de la durée de la transition, le maintien des mesures conservatoires automatiques prises dès la prise du pouvoir le 05 septembre 2021…

Face à cette position, quelle attitude, quelle réaction profitable au CNRD, profitable à la Guinée, à ses populations ?

Il est vrai que le lobbying, la diplomatie souterraine déployée ont joué un rôle important, mais le report des sanctions économiques contre la Guinée résulte essentiellement de la compréhension et de la tenue en compte par les chefs d’état de la sous-région du sérieux et de l’utilité des actions engagées par le CNRD et son Président depuis le 05 septembre 2021 dans l’intérêt de la Guinée, principal référentiel de tous les enjeux.

Justement, par rapport à ces enjeux, il est souhaitable, d’ici le 03 juillet, la prochaine date de rencontre des Chefs d’État de la CEDEAO, que le CNRD accepte Ibn Chambas comme émissaire de l’institution sous-régionale en Guinée, en inscrivant sa mission dans le strict cadre de l’arbitrage entre les parties prenantes de la transition. Clairement indiquer que son rôle n’a nullement pour objet de donner des injonctions, ni pour instruire l’orientation ou la marche à suivre.

S’agissant de la durée de la transition, les 36 mois adoptés par le CNT pourraient être discutés en mettant en priorité les actions nécessaires à la refondation que le CNRD envisage et que les Guinéens, conscients des lourds passifs hérités des précédents gouvernements, soutiennent activement. Les discussions devraient aboutir à un délai ou un chronogramme dit raisonnable, mais n’occultant aucun des points importants inscrits dans le programme du CNRD avant le retour à l’ordre constitutionnel.

En procédant ainsi, le CNRD ne cède pas à la pression, ni à la phobie d’une quelconque sanction économique, financière de la CEDEAO avec laquelle elle commerce en réalité moins que la Chine, l’Union européenne…, mais éviterait la solidarité d’action des institutions  internationales bi et multilatérales capables de prendre de nombreuses mesures contraignantes comme la suspension de l’aide au développement en cours, le blocage des investissements publics programmés, ou d’autres batteries de sanctions comme l’interdiction de voyage des membres du gouvernement, la suspension du pays dans d’autres organismes internationaux ; le blocus sur le commerce, les produits de pêche, certaines matières premières comme l’or, le diamant… Même si la bauxite pourrait échapper à cette série de mesures économiques drastiques, étant une matière première stratégique, entrant dans les 50% de l’économie mondiale (alimentation, automobile, construction, diverses industries lourdes…) alimentant quotidiennement les industries du nord, garantissant les millions d’emplois pour leurs populations…

Dans un tel contexte, il faut l’avouer, il serait très difficile que l’action gouvernementale aboutisse aux espoirs que suscite le CNRD à travers la volonté politique clairement et solennellement définie par le Colonel Mamadi Doumbouya depuis la prise du pouvoir.

Devant la pression internationale et les éventuels embargos tous azimuts contre Conakry, le CNRD peut-il, doit-il brandir l’arme de dissuasion économique que représente la bauxite? Rien n’est moins sûr.

En attendant de revenir amplement dans notre prochaine livraison sur les capacités ou non de rétorsion économique de Conakry, faut-il rappeler que le Ghana détient des intérêts hautement stratégiques en Guinée avec Ashanti Gold, propriété du pouvoir d’Accra qui exploite la SAG de Siguiri. Sans oublier de mentionner que la Guinée possède dix (10) siècles de réserve mondiale de bauxite.

En tout état de cause, avec la mondialisation, imbriquant les économies les unes les autres, créant l’interdépendance entre les États, au-delà des avantages comparatifs que chaque pays peut avoir, il est important pour la Guinée, pour la CEDEAO et pour la communauté internationale que la compréhension sur fond de dialogue permanent l’emporte sur la passion.

LE CRAS

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