Une banque publique peut-elle aider les plus pauvres?

Nulle part dans l’économie, les inégalités entre les nantis et les démunis ne sont aussi frappantes que dans les secteurs où le gouvernement applique les réglementations les plus strictes. Clairement, l’excès de réglementations provoque ce que les gouvernements prétendent combattre. Cela est particulièrement vrai dans le secteur financier. Au cours des dernières années, les socialistes sud-africains ont appelé les Sud-Africains à la création d’une banque publique au service des Noirs pauvres, alors même que nous disposons déjà d’institutions financières sous la forme de «mashonisas» (petits prêts informels). Le problème? Les élites sud-africaines confondent leurs propres désirs et besoins avec ceux de tous les autres, en particulier les pauvres.

Les mashonisas répondent à un besoin des plus pauvres

Cela signifie que les mashonisas ne sont pas reconnus pour le rôle vital qu’ils jouent dans la vie de nombreux pauvres, car les besoins financiers de ces derniers ne sont pas les mêmes que ceux des décideurs. Je me souviens encore de mon premier emploi en 2012. je devais suivre une formation le premier mois sans salaire. Le Mashonisas m’a financé au moins les trois premiers mois où j’ai utilisé les prêts pour payer les coûts de transport et autres. Aujourd’hui, les mashonisas fournissent un financement gagé sur le salaire aux personnes qui ne peuvent prétendre à un prêt nulle part ailleurs en raison de leur profil de risque. Ces entreprises sont présentes dans pratiquement tous les lieux de travail d’Afrique du Sud. Dans chaque lieu de travail où j’ai été, il y avait toujours un mashonisa, même si la plupart d’entre eux étaient informels. Cela prouve simplement que le gouvernement ne peut pas éliminer des structures qui répondent à une demande et un besoin réels.

Les entraves à la création d’une structure financière

Que faudrait-il pour qu’un mashonisa ou un Stokvel devienne une banque commerciale ou une mutuelle légale? Il s’avère que les conditions requises pour une licence bancaire en Afrique du Sud sont explicitement anti-pauvres et anti-petites entreprises. Pour une banque mutuelle (une banque dans laquelle les déposants sont propriétaires (comparable à une stokvel), les entrepreneurs potentiels doivent au moins avancer 10 millions de rands de capital. Cela s’ajoute à la réglementation sur les intérêts qui stipule que si vos clients ont un profil intrinsèquement risqué, vous ne pouvez pas ajuster les taux d’intérêt pour en tenir compte. La Banque de réserve, en tant qu’autorité prudentielle, peut également ajouter d’autres exigences en fonction de son jugement sur ce qui est dans l’intérêt public. En réalité, l’intérêt du public est dans l’œil de l’usager. Je dirais que si une banque peut attirer des déposants et des emprunteurs, il est clair que ses opérations sont dans l’intérêt du public. Si vous envisagez d’enregistrer votre propre banque, vous aurez besoin d’un capital de 250 millions de rands. Il est également interdit à toute personne physique ou morale de détenir plus de 15% de la banque, ce qui limite la mobilisation de capital-risque.

Il est clair que la création d’une banque est hors de la portée pour tout jeune entrepreneur qui pourrait commencer à percevoir de petits dépôts (de l’ordre de 100 rands) et à octroyer de petits prêts. Ceci en dépit du fait que les mashonisas dans les townships et la plupart des lieux de travail en Afrique du Sud sont déjà engagés dans des prêts à petite échelle, illégalement selon la réglementation en vigueur. Étant donné que les activités bancaires en Europe ont commencé avec des petits changeurs de fonds et des prêteurs qui ont fini par devenir des entreprises géantes, le régime réglementaire actuel n’est tout simplement pas approprié pour un pays pauvre comme l’Afrique du Sud.

Des politiques au détriment des plus pauvres

Les
politiciens, par le biais de la réglementation, ont créé exactement le problème qu’ils proposent maintenant de résoudre grâce à une réglementation plus poussée et à la création d’une banque étatique. L’Afrique du Sud ne manque pas de Noirs pauvres capables de créer de petites entreprises dans le secteur bancaire. Ce sont les coûts de démarrage élevés imposés par le gouvernement qui rendent cela pratiquement impossible. Nul ne peut nier que la déréglementation de ce secteur entraînerait une augmentation du nombre de banques en faillite. Ce serait bien, à condition que les clients aient le choix et l’accès à des banques offrant plus ou moins de sécurité.

Le marché permet à chaque individu de définir sa propre propension au risque. La réglementation gouvernementale ne supprime pas le risque, elle en fait simplement un privilège pour les riches. L’hypothèse qui sous-tend toute réglementation est qu’il est impossible de faire confiance aux pauvres contrairement aux riches (souvenez-vous que plus le risque est élevé, plus les taux d’intérêts sont lourds). Le coût de la conformité réglementaire pour les pauvres est plus élevé qu’il s’agisse de payer des consultants, de payer quelqu’un pour qu’il passe du temps à remplir des formulaires, des exigences de fonds propres, des droits de licence, etc.

La liberté d’entreprendre s’impose plus que tout !

Le gouvernement sud-africain ne peut tout simplement pas prétendre être pro-pauvres, alors qu’il leur impose une telle réglementation lorsqu’ils osent créer leur propre entreprise, ou quand ils exploitent déjà des entreprises informelles. Un gouvernement favorable aux pauvres devrait plutôt s’engager dans une vaste campagne de déréglementation de tous les secteurs de l’économie. Il faudrait bien entendu ignorer les défaitistes, qui, de leurs tours d’ivoire, qui ne savent pas ce que c’est que de se coucher l’estomac vide. Quiconque comprend ce que signifie être pauvre comprend pourquoi la déréglementation de l’économie est un impératif moral de premier ordre.

La pauvreté ne diminuera pas tant que les pauvres ne seront pas autorisés à faire leurs propres choix. C’est vrai, qu’il s’agisse de terrains communaux, de contrats de travail ou de réglementations sur les banques et d’autres secteurs. Avoir des choix signifie aussi la possibilité d’un échec. Si nous ne pouvons pas accepter que les adultes pauvres soient capables d’être responsables, la pauvreté persistera encore pendant un certain temps.

Mpiyakhe Dhlamini, analyste pour The Free Market Foundation

Article publié en collaboration avec Libre Afrique