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Honorable Saikou Yaya Barry de l’UFR: « Aller aux élections présidentielles du 18 octobre, c’est encore sacrifier des Guinéens »

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Le secrétaire exécutif de l’Union des Forces Républicaines est catégorique sur la non-participation de son parti aux élections présidentielles du 18 octobre 2020. Dans cette interview qu’il nous a accordée au siège de son parti, le week end dernier, l’honorable Saikou Yaya Barry s’adressant aux leaders de l’opposition prenant part à ce scrutin reste persuadé que celui-ci, ne sera ni juste ni transparent. Il n’y voit pas le chemin de l’alternance. Ainsi, il reste affiché à la lutte que mène le FNDC à cet effet. Après avoir établi le bilan du régime en place,  il invite les Guinéens de s’inspirer du peuple malien pour faire partir Alpha Condé et son régime.  
Lejour.info : On sait que l’état d’urgence sanitaire à cause du Coronavirus  n’est pas levé. Mais l’UFR vient de tenir son Assemblée générale. Est-ce cela va continuer ? 
Honorable Saikou Yaya Barry : Nous avons été les premiers à fermer notre Assemblée générale à cause de la COVID-19 par rapport aux autres partis politiques. Il ne faut pas l’ignorer. Mais, nous avons constaté que c’est une période qui a permis à Alpha Condé de dérouler son programme machiavélique de troisième mandat. Il est interdit aux religieux de prier, il est interdit aux gens de se mobiliser, mais il n’est pas interdit pour les gens du RPG Arc-en-ciel d’aller au Palais du peuple,  de mobiliser la mamaya tant à Conakry qu’à l’intérieur du pays. Nous nous sommes dits  « ça suffit.  Même si nous devons mourir dans le combat, mais faisons-le ». Donc, aujourd’hui nous mettons des précautions nécessaires pour que les gens lavent les mains, mais ça ne nous interdit plus d’organiser nos mobilisations. C’est le lieu indiqué pour nous de préparer les esprits à la lutte que nous continuerons à mener.
Quelle est la position de l’UFR par rapport aux élections présidentielles du 18 octobre ?
Nous ne participerons pas. C’est ce qui est prévu. Nous ne participerons pas à cette élection. Par ce que nous estimons qu’à un moment donné de notre histoire, il faut des règles morales, politiques afin de faire évoluer la société. Nous ne sommes pas à notre première fois de non-participation à des élections présidentielles. En 2003, nous avons refusé de participer aux élections présidentielles. Et Lansana Conté avait fabriqué un candidat. Je me rappelle qu’on était avec le RPG à l’époque. La non-participation de l’UFR ne signifie pas que le parti est mort. C’est un parti qui est appelé à vivre aussi longtemps que cela. Donc notre non-participation, c’est une question d’harmonie entre ce que nous avons combattu jusque-là et la décision que nous prenons. Nous nous sommes battus contre la violation de cette Constitution de 2010. Nous nous sommes battus contre la candidature d’Alpha Condé pour un troisième mandat. Et dans ces plusieurs combats, il y a eu assez de morts. Des gens ont perdu des enfants. Nous estimons pour être logique avec soi-même, il est important qu’à un moment donné qu’on ne s’attarde pas sur des questions subjectives et  abandonner cette population. Nous voulons aujourd’hui qu’il y ait de repères dans nos luttes. C’est la raison pour laquelle nous estimons qu’il n’est pas opportun d’aller à ces élections avec un fichier électoral corrompu. Nous savons que ce n’est pas la CENI qui organise, c’est la Villa 33 qui organise les élections. Y aller avec Alpha Condé, c’est de lui donner un quitus pour un mandat de trop. Aller à ces élections c’est encore sacrifier des Guinéens. C’est la raison pour laquelle, nous demandons aux Guinéens de se lever pour manifester et empêcher qu’Alpha Condé ne soit président pour une troisième fois dans notre pays. Quel gâchis pendant 10 ans de pénitence ! Regardez nos routes, regardez comment nous vivons, prenez la route de chez-vous, vous vous rendrez compte que pendant les dix ans, rien n’a changé. Donc nous, nous disons que la Guinée a
besoin de se retrouver, de se réconcilier avec elle-même. Que les Guinéens comprennent que ce n’est pas en déchirant le tissu social que nous pouvons faire la Guinée. C’est pourquoi, nous demandons au peuple de Guinée de se réveiller, et empêcher qu’Alpha Condé gagne son troisième mandat.
Comment se porte le parti avec les départs massifs qu’il a enregistrés ces derniers temps?
Quatre ou cinq qui quittent le parti vous dites beaucoup. Aujourd’hui nous avons enregistré plus de 22 groupes. D’où au moins dans chaque groupe, il y a une vingtaine de personnes. Alors que vous parlez de quatre transitaires politiques qui ont transité à l’UFR pour repartir là où ils veulent, je comprends bien. Mais j’avoue que tous ceux qui ont fondé ce parti de 2010 à 2012, personne n’a quitté sauf la présidente des femmes. Avec elle je peux comprendre. Mais Dr Dine Touré est arrivé à l’UFR en 2012. Il était au CNT au nom du parti de Facinet Touré. Baidy Aribo est arrivé au parti en 2012. Il avait son parti qu’on appelait AFAN. Après la transition,  il est arrivé chez-nous. Vous prenez le Badara Koné qui est venu à la jeunesse, il est arrivé il y a 17 mois et il est reparti. Il y a des valeurs dans ce parti, il y a des personnes qui arrivent dans ce parti et nous assistons la dernière fois à l’arrivée de 150 religieux qui sont venus adhérer à l’UFR. Donc je me dis, le départ de quatre personnes si c’est comme ça pour que milles arrivent, je souhaiterais que ça se passe comme ça.
Comment est-ce voyez-vous la candidature des autres partis politiques membres du FNDC ?
Nous ne jugeons personne. Notre souhait en tant que l’UFR est que nous restions dans la même position de combat jusqu’à la victoire finale. Mais qu’à cela ne tienne, ils ont choisi un autre chemin. Chacun sait pourquoi il a pris cette décision de partir ou de ne pas partir. De notre part, c’est claire. Nous ne participerons pas parce que nous pensons être en harmonie avec ce qu’on a fait tout le temps. C’est-à-dire dans les idées que nous avons défendues. Et eux à un moment donné, ils étaient avec nous dans ces mêmes idées, ils ont décidé de faire autrement. On n’a pas un jugement à faire. Ce qui reste clair c’est le peuple de Guinée qui a un jugement à faire.  C’est au peuple de Guinée de se réveiller.
Comment voyez-vous la gestion du pays d’une façon globale par le régime d’Alpha Condé ?
C’est une catastrophe. Nous sommes dans une pénitence. Si vous prenez la route de Boké-Boffa, vous vous rendrez compte combien de fois nous sommes malheureux. Aujourd’hui c’est un envahissement de notre territoire par des gens, de démons de la société. Nous avons l’impression que c’est un ennemi qui a envahi la Guinée et est en train de piller les ressources de ce pays afin de trouver un moyen de ramener ça chez lui. Tous ces cadres politiques qui sont autour d’Alpha Condé personne n’a sa famille en Guinée. Ils ont tous leurs enfants à l’étranger. Ils pillent le pays et amènent à l’étranger. Donc je me  dis que la gestion est négative. Socialement négative, économiquement désastreuse et politiquement grave. Nous n’avons jamais organisé une élection dans les temps. Nous avons toujours des problèmes liés à la politique qui amènent à des pertes de vies humaines depuis qu’il est arrivé au pouvoir. Il y a plus de 100 et quelques morts depuis qu’Alpha est arrivé au pouvoir pour des manifestations dans l’optique d’obtenir une démocratie vraie. Deuxièmement, économiquement parlant aujourd’hui, nous sommes l’un des pays les plus corrompus au monde où il y a des détournements des milliards. Ne serait-ce que les routes, on nous annonce qu’il a dépensé deux milliards de dollars. Vous n’avez pas cette route en Guinée. Ils ont dépensé trois milliards de dollars pour l’énergie. Aujourd’hui comment pouvez-vous voir un président qui n’a pas pu construire dix km à lui. Je n’ai pas dit profilé. On nous prépare des hôtels. En principe, partout où  il y a
hôtel,  existent des routes. On doit évaluer le niveau du développement par l’électricité, l’eau, les routes, les hôpitaux, les écoles etc. Malheureusement, ce n’est pas le cas avec Alpha Condé. Donc économiquement c’est désastreux. Troisièmement, socialement, c’est catastrophique. Il a cherché à diviser les Guinéens, mais pas seulement diviser les ethnies. Au niveau des ethnies,  il a cherché à diviser les familles. Quand vous prenez Siguiri, avant il y avait un seul centre de rencontre pour les sages de la préfecture. Aujourd’hui chaque famille a son centre de rencontre. Parce qu’il a créé ça pour diviser les Guinéens. Donc c’est désastreux. Alpha Condé est une calamité pour les Guinéens.Saikou Yaya Barry de l'UFR monte au créneau: «Alpha Condé c'est l'homme et  son contraire...»
Pourquoi selon vous, en dépit de plusieurs manifestations entraînant des morts et des nombreux dégâts, ça coince toujours en Guinée. En tout cas le régime ne fléchit pas ?
Ce que nous savons, qu’ils refusent et qu’ils le font sciemmentC’est pour mater la psychologie des Guinéens. Ils le font pour que les Guinéens se taisent. N’oubliez pas que c’est le système Machiavélique. Le système tue deux personnes par jour pour amener les gens à avoir peur. Parce que tuer 15 à 20 personnes, ça peut créer un soulèvement populaire. Mais tuer deux dans un quartier comme Dar-es-Salam, un à Cosa, là, les esprits sont psychologiquement frappés par le système Alpha.
Avec la participation de ténors de l’opposition comme l’UFDG à la présidentielle, quel sera désormais l’avenir du FNDC?
 Le FNDC continuera à se battre pour le départ d’Alpha Condé. Je vous dis à partir de maintenant nous continuons. Et ce combat ne s’arrête pas jusqu’à ce qu’Alpha Condé quitte le pouvoir. Donc l’avenir est là avec des personnes convaincues. On dit « quand tu penses que ce que tu fais est juste, même si personne n’est derrière toi, continue ton combat. Parce que ton combat est juste ».  Voila pourquoi le FNDC doit exister.
Quelle analyse comparative faites-vous entre la situation politique en Guinée et celle de la Côte d’Ivoire ou les deux présidents briguent un troisième mandat présidentiel d’une part, et d’autre part entre la Guinée et le Mali ?
L’analyse est simple. Les gens doivent accepter de respecter leur parole donnée. Un président à vie,  ce n’est plus possible en Afrique. Tu viens faire un mandat, si tu veux on te renouvelle un second mandat. Après ça, occupe-toi à autre chose. Arrêtons de penser qu’il y a toujours un homme providentiel qui peut régler tous les problèmes.  IBK (NDLR : Ibrahim Boubacar Keita),  lui, il n’a pas terminé son second mandat, il est parti. Parce que la gestion politique et économique a été négative à son niveau. Tout dépend des peuples. Nous disons aujourd’hui,  les Guinéens doivent se référer à ce qui s’est passé au Mali et se rebeller contre la dictature. Alpha a cherché à nous diviser, mais nous devons refuser cela. Parce que c’est de notre survie qu’il s’agit.
 Entretien Réalisé par Tidiane Diallo

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