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Guinée, Mali, Burkina : « ll n’a pas été question…de créer une fédération » dixit Ousmane G. Diallo

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En Guinée, le colonel Doumbouya -qui a pris le pouvoir il y a 18 mois- promet de le rendre aux civils dans un peu moins de deux ans. Mais l’opposition est sceptique, car plusieurs de ses cadres sont en prison et ses deux leaders vivent en exil. N’est-ce pas en effet de mauvais augure pour la suite de la transition ? Ousmane Gaoual Diallo, porte-parole du gouvernement guinéen et ministre des Postes, des Télécommunications et de l’Économie numérique, de passage à Paris, est notre invité.

RFI : Le 21 février, devant le Parlement de transition, le président de transition, le colonel Doumbouya, a annoncé qu’il quittera le pouvoir à la fin de la transition, c’est-à-dire à la fin de l’année prochaine. Est-ce à dire qu’il ne sera pas candidat à la prochaine élection présidentielle ?

Ousmane Gaoual Diallo : Non seulement il ne sera pas candidat, il l’a affirmé au moment de l’élaboration du chronogramme, mais il l’a répété aussi quand le besoin s’est fait sentir. C’est un engagement qu’il a pris devant la population guinéenne.

Selon plusieurs sources, il y a eu au moins deux morts le 16 février à Conakry, à la suite de la répression brutale d’une manifestation par l’armée. N’est-ce pas de mauvais augure pour la suite de la transition et pour le retour des civils à la fin de l’année prochaine ?

Le gouvernement déplore systématiquement les violences qui entrainent des victimes, mais prend aussi des dispositions, c’est quelque chose qu’il faut noter, pour que les auteurs de ces violences puissent être traduits devant les juridictions de ce pays. Il faut aussi rappeler que les premiers accusés d’assassinats de manifestants sont actuellement en procès devant les tribunaux de Conakry, et c’est déjà une première avancée. L’usage des armes de guerre dans les manifestations est prohibé et c’est pour cette raison que les auteurs de ces utilisations d’armes de guerre sont arrêtés et sont traduits devant les juridictions.

Le 17 février dernier, monsieur le ministre, votre gouvernement a menacé d’interdire les principaux partis politiques du pays suite à un appel à une manifestation. Alors vous avez déjà interdit les manifestations, vous avez dissous le Front national pour la défense de la Constitution, le FNDC, est-ce qu’on peut encore parler de transition démocratique en Guinée ?

La réalité, c’est que les manifestations ne sont pas interdites sur l’ensemble du territoire national. Elles sont interdites sur une partie du territoire, notamment sur les axes qui donnent lieu à beaucoup de violences. Pour le reste, les partis politiques continuent d’agir, continuent de maintenir leurs activités en critiquant l’actualité, en échangeant avec leurs membres, donc il n’y a pas eu de menace de dire qu’on va dissoudre les partis politiques. Cependant, les partis politiques, lorsqu’il y a des déviations par rapport à la loi, lorsqu’il y a violation de la Charte, il va sans dire qu’il y a des sanctions qui sont prévues.

Alors, vous appelez au dialogue avec tous les partis, et notamment l’opposition, mais avec qui dialoguer si plusieurs figures de l’opposition et de la société civile sont en prison ? Je pense bien sûr à Foniké Menguè et à Ibrahima Diallo, du FNDC, le Front national pour la défense de la Constitution, et je pense à Saikou Yaya Barry, de l’UFR…

Déjà, ils ne sont pas poursuivis pour des actions politiques qu’ils mènent. En tout état de cause, le dialogue n’est pas entre des individus et l’État, le dialogue est entre les institutions. Ce sont les organisations que les uns et les autres représentent qui sont invitées autour du dialogue. Donc on peut, bien entendu, avoir un certain nombre d’acteurs politiques qui ont maille à partir avec la justice, mais [faire en sorte] que le dialogue soit maintenu parce que les partis politiques, les organisations de la société civile, ne se limitent pas à des individus.

Oui, mais voilà déjà près de huit mois que ces trois personnalités, Foniké Menguè, Ibrahima Diallo et Saikou Yaya Barry, sont en prison. Est-ce qu’il ne vaudrait pas mieux les libérer pour décrisper la situation et pour amorcer ce dialogue ?

Le processus judiciaire se poursuit. Il me semble que le ministre de la Justice a été clair là-dessus. Toutes les dispositions sont prises pour que la justice puisse travailler dans la sérénité et rapidement pour juger ces personnes qui sont incriminées.

Le dialogue avec les partis de l’opposition et les organisations de la société civile, c’est pour quand ?

Le dialogue est en cours. Ils sont tous invités à prendre part au dialogue qui est soutenu et suivi par le Premier ministre, donc c’est une ouverture qui est là et que nous maintenons malgré tout.

Mais concrètement, Cellou Dalein Diallo et Sydia Touré, les deux principales figures de l’opposition, ne sont plus dans votre pays actuellement, ils sont en exil. Est-ce qu’ils peuvent rentrer au pays sans être poursuivis ?

Ils peuvent rentrer au pays sans aucun problème. D’ailleurs, Sydia [Touré] ne fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire dans le pays, donc je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas rentrer s’il le souhaite. Cellou [Dalein Diallo]est convoqué devant une juridiction, encore qu’il ne soit pas le seul responsable convoqué dans cette affaire, les autres protagonistes mis en examen dans ce dossier sont à Conakry et personne n’est incarcéré, donc je ne vois pas en quoi il pourrait refuser de rentrer au pays.

Mais n’est-il pas difficile de dialoguer avec le numéro un de l’opposition, Cellou Dalein Diallo, si celui-ci est poursuivi par la justice ?

Peut-on, pour autant, garantir une certaine impunité simplement parce qu’on est le chef de file de l’opposition, ou bien on peut renforcer l’appareil judiciaire aux yeux de l’opinion guinéenne et que chacun se prête au jeu d’aller faire face à la justice, si ceci est nécessaire.

Ne faut-il pas faire un geste à l’égard de Cellou Dalein Diallo pour que le dialogue reprenne ?

Le dialogue doit pouvoir statuer sur ces questions.

Suite à une rencontre, le 9 février dernier, entre les ministres des Affaires étrangères de la Guinée, du Mali et du Burkina Faso, a été émise l’idée de créer une fédération entre vos trois pays. Où en est-on de ce projet ?

Il n’a pas été question dans le communiqué de créer une fédération, mais un renforcement de la coopération. Je pense qu’il est de la responsabilité aussi des gouvernants d’aller rechercher des formes de coopération avec les pays voisins, avec les pays tiers, et c’est ce qui est en train d’être fait par les autorités de la transition.

En tout cas, la fédération, c’est le souhait exprimé publiquement par le Premier ministre burkinabè, Apollinaire Joachim Kyelem de Tambela…

Je ne commente pas ces commentaires du Premier ministre burkinabè. Je sais que la Guinée allait chercher un renforcement de coopération avec ces pays, ce sera tant mieux pour nos économies.

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